📅 Une bataille de calendrier

La chronologie des médias française est à nouveau sur le banc des accusés. En ligne de mire : l’inégalité de traitement entre les plateformes de streaming, notamment Netflix, qui vient de saisir le Conseil d’État pour contester l’arrêté généralisant la nouvelle chronologie à tous les acteurs, même à ceux qui n’en sont pas signataires.

Depuis l’expiration de l’accord de 2022 en février dernier, aucune entente n’a été trouvée entre les plateformes et les professionnels du cinéma. Résultat : Netflix, bien que majeur financeur de la création française, reste contraint d’attendre 15 mois avant de pouvoir diffuser ses propres films, là où Canal+ bénéficie d’une fenêtre de 6 mois et Disney+ de 9 mois.

💰 Netflix, principal contributeur… mais mal classé ?

Le géant du streaming américain ne cache pas son incompréhension :

« Il nous paraît légitime d’être à 12 mois dans la chronologie des médias. »

Et il n’est pas le seul à le penser. Car les chiffres sont là :

• 50 millions d’euros investis chaque année dans le cinéma français

• Plus de 250 millions d’euros injectés dans les séries, films et documentaires en 2024

• 80 % des investissements SVOD dans le cinéma français réalisés par Netflix, selon le CNC

Pourtant, les syndicats du cinéma privilégient une logique de pourcentage d’investissement sur le chiffre d’affaires, et non un montant absolu. Un critère qui pénalise Netflix, malgré sa contribution massive.

🎞 Un modèle qui évolue plus vite que la loi

La France est l’un des rares pays à encore imposer une chronologie stricte. Ailleurs dans le monde, la fenêtre entre la sortie en salle et la mise en ligne sur les plateformes est souvent réduite à 3 mois, voire 1 mois et demi. Un écart qui devient difficilement tenable à l’ère du streaming instantané.

Anne-Gabrielle Dauba-Pantanacce, porte-parole de Netflix France, déclare :

« 15 mois, c’est beaucoup trop long. On est le seul acteur à avoir signé cette nouvelle chronologie. On est passé de 36 à 15 mois, c’est un saut quantique, mais encore insuffisant. »

📽 Une relation ambivalente avec les salles

Malgré son implication croissante dans la production française, notamment en matière de séries, Netflix reste à la marge du cinéma traditionnel. Les salles de cinéma en France boudent toujours les productions estampillées Netflix, accusant la plateforme de contourner le circuit classique.

Mais pour Netflix, la logique est claire :

« Nous permettons à nos abonnés de voir immédiatement les contenus qu’ils ont financés. »

Un argument massue à l’heure où la consommation immédiate prime, et où l’abonné attend du contenu à la demande, pas avec un an de retard.

⚖ Vers un bouleversement juridique et culturel ?

La saisine du Conseil d’État pourrait bien marquer un tournant historique dans l’organisation de la diffusion cinématographique en France. Derrière cette bataille de délais, c’est tout un modèle de financement, de diffusion, et de consommation du cinéma qui est en jeu.

Netflix, par cette démarche, souhaite une reconnaissance à la hauteur de ses efforts. Et la question est simple : un acteur qui finance plus que les autres doit-il attendre plus longtemps ?

🔍 À retenir :

• Netflix conteste le délai de 15 mois imposé par la chronologie des médias en France.

• La plateforme investit massivement dans la création française.

• La logique actuelle favorise le pourcentage d’investissement, non le montant.

• Une action en justice est engagée pour faire évoluer la réglementation.

• Le débat oppose deux visions du cinéma : traditionnelle et numérique.